Un bec-croisé bifascié au NichoirAprès un séjour de deux mois au Nichoir, par une belle journée printanière de mars, un bec-croisé bifascié en santé a été relâché dans un grand peuplement d’épinettes. L’oiseau blessé avait été trouvé à Waskaganish, à 1200 km au nord de Montréal.

Ce bec-croisé (Loxia leucoptera) juvénile femelle arriva au Nichoir en décembre dernier, après un voyage de neuf heures avec le couple qui l’avait repéré et en avait pris soin en attendant de pouvoir l’apporter à Hudson. Après un examen approfondi, Le Nichoir confirma que l’oiseau, blessé par un chien, avait une fracture de l’os coracoïde (une partie de l’omoplate).

La fracture s’était calcifiée de telle sorte que l’aile était parfaitement mobile et que l’oiseau pouvait très bien voler.

La principale tâche du Nichoir consista à vérifier si l’état du bec-croisé permettait sa remise en liberté et s’il ne s’était pas accoutumé aux humains. L’accoutumance peut se produire lorsque des oiseaux sauvages ont passé du temps dans un environnement domestique, ils cessent alors de voir les humains comme des prédateurs. Une fois relâchés, ces oiseaux ne peuvent généralement ni survivre dans la nature ni s’intégrer aux oiseaux de leur propre espèce.

Pour surmonter cette difficulté, le Nichoir plaça le bec-croisé dans une cage entourée de miroirs, si bien qu’il croyait être en compagnie de ses congénères. Il appréciait son reflet et passait des heures à pépier pour lui-même ! Par ailleurs, la cage était garnie de branches d’arbres que le bec-croisé déchiquetait en un rien de temps.

Grâce à Chris Clouthier de l’Arboretum Morgan, une réserve boisée de l’université McGill de Montréal, Le Nichoir put procurer au bec-croisé une variété de cônes de conifères venant d’arbres divers : thuya occidental, pin blanc et différentes sortes d’épinettes. L’oiseau les dévorait tous, nous a dit la bénévole qui prit soin de lui quotidiennement : Rita Reynolds, de Saint-Lazare, Québec.

« Le bec-croisé était tout excité lorsqu’on lui donnait de nouveaux cônes», dit Rita. « Il repérait immédiatement les nouveaux et s’affairait à les inspecter et à choisir ceux qui feraient son déjeuner. »

Afin d’imiter le plus possible l’alimentation naturelle du bec-croisé, le Nichoir lui offrit aussi une variété de graines et de noix (surtout des pignons de pin), des insectes, des pâtées d’insectes et des suppléments de calcium.

« J’ai découvert qu’il aimait les arachides et les amandes non décortiquées», a indiqué Rita, « non pour les manger mais pour le pur plaisir de réussir à les ouvrir. »

La sélection de graines et de noix a fourni au bec-croisé une alimentation convenable et, en prime, elle l’a aidé à aiguiser et contrôler la longueur de son bec. Le bec de cet oiseau lui permet d’extraire les graines des cônes de conifères, ce qu’il fait en en écartant doucement les écailles.

Après un séjour de deux mois au Nichoir, l’oiseau était prêt à être relâché. Mais, avant, le centre consulta des ornithologues et des biologistes locaux afin de s’y prendre au mieux, car les becs-croisés ne fréquentent habituellement pas la région de Montréal, mais le Nord-du-Québec.

Le lieu et le moment sont des éléments importants de la remise en liberté des oiseaux, particulièrement des oiseaux vivant en bande. Il faut que d’autres oiseaux de la même espèce se trouvent aux environs, et il faut qu’elle ait lieu avant la migration. Les becs-croisés retournent vers le Nord en mars, et Le Nichoir voulait être sûr que l’oiseau réhabilité ne rate pas sa migration.

En conséquence, il fut décidé de le relâcher début mars dans l’Arboretum Morgan qui offre de belles provisions de cônes et où, auparavant, des becs-croisés avaient été repérés.

Il fut libéré par une belle journée claire et exceptionnellement chaude, dans un grand peuplement d’épinettes.

« L’oiseau s’est envolé sans hésiter vers une épinette », nous a dit Rita. « Puis il a commencé à chanter son « chant de joie » ! J’étais très fière de lui ! »

Elle a ajouté que les soins reçus au Nichoir avaient bien préparé le bec-croisé à sa survie dans la nature.

« J’étais sûre qu’il n’aurait pas de difficultés à reconnaître les cônes de conifères et à trouver suffisamment à manger » a-t-elle précisé. « Et, avec un peu de chance, il aura réussi à trouver un compagnon de voyage de retour. »